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L'effacement de la caution d'un administrateur (personne physique) en passant par la "case faillite"

Dernière mise à jour : 28 nov. 2023


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Position de la question Il est très fréquent qu'un administrateur - personne physique - donne sa caution pour tout ou partie des dettes de la société qu'il dirige. En cas de faillite de cette société, les créanciers de l'entreprise auxquels il a concédé cette caution pourront se tourner vers lui pour obtenir paiement de ce que la société ne peut plus payer. Ces dettes, qui parfois sont largement supérieures aux actifs personnels de ce dirigeant, peuvent, potentiellement, le poursuivre jusqu'à la fin de ses jours. Leur paiement peut aussi être poursuivi contre le conjont dans certaines circonstances, voire être transmises aux héritiers qui accepteraient la succession. La solution à une telle situation réside-t-elle dans la faillite personnelle de cet administrateur ? La faillite d'une personne physique permet, en effet, et sauf exception (dont la faute grave et caractérisée ayant entraîné la faillite de la société), de bénéficier, rapidement, et quasi-automatiquement, d'un effacement complet des dettes de cette personne faillie (en ce compris les dettes issues de la caution donnée). Cet effacement peut également profiter au conjoint. Dès lors, se pose la question de savoir si un administrateur peut, ou non, faire aveu de faillite à titre personnel et ainsi bénéficier de cet effacement pour se débarrasser définitivement (ainsi que son conjoint et ses héritiers) de la poursuite des créanciers auxquels il a donné sa caution et repartir d'une page blanche dans sa vie professionnelle.

La définition de l'entreprise au cœur du débat La réponse git dans la notion « d’entreprise » qui a, aujourd'hui, une définition très large. Sont, en effet, des entreprises, au sens de l'article I.1,1° du Code de droit économique, différentes « organisations », en ce compris « les personnes physiques qui exercent à titre indépendant une activité professionnelle ». Toute entreprise - à l'exception des personnes morales de droit public - peut être déclarée en faillite ou bénéficier d'une procédure de réorganisation judiciaire. Un administrateur de société, dès lors qu'il exerce, en cette qualité, une activité professionnelle à titre indépendant, est-il, ou non, une entreprise ? La réponse à cette question a fait couler beaucoup d'encre et a divisé la jurisprudence depuis l'entrée en vigueur, le 1er mai 2018, du Livre XX Code de droit économique. Les juridictions de fond en partie en faveur d'une assimilation de l'administrateur à une entreprise Une partie des Cours et tribunaux du pays s'est positionnée, depuis 2018, en faveur de cette assimilation en raison, entre autres, du libellé précité du texte de l'article I.1, 1° du Code de droit économique. Cette solution n'était toutefois pas unanime, une partie de la jurisprudence (et notamment la Cour d'appel de Mons), et de la doctrine, considérant que le mandat d'administrateur ne conférait la qualité d'entreprise audit administrateur que pour autant que l’exercice de cette fonction corresponde au concept d’ « organisation » tel que visé par le Code de droit économique (qui ne le défini toutefois pas). Suivant ce courant, la notion d'organisation, telle que prévue par la loi, se caractérise d'abord par l'agencement de moyens matériels financiers et humains. Dès lors, la seule qualité d'administrateur ne suffit pas à être assimilé à une entreprise. Encore faut-il établir, pour qu'une telle qualification soit retenue, que l'activité de cet administrateur est "organisée". En d'autres termes, que cet administrateur mette en œuvre, pour l'exercice de son mandat, des moyens matériels, financiers et/ou humains qui lui soit propres (tels que la titularité d'un numéro d'entreprise/TVA, l'existence d'un secrétariat personnel, l'acquisition d'un système informatique utilisé pour l'exercice de la mission d'administrateur, un abonnement téléphonique, un bureau, etc...), c'est-à-dire distincts de ceux mis en œuvre par la personne morale administrée pour son activité. Il s'agit d'une conception dite restrictive de la notion d'exercice « à titre indépendant d'une activité professionnelle ». L'arrêt de la Cour de cassation du 18 mars 2022 La question a été soumise à la Cour de cassation. Celle-ci a, dans son arrêt du 18 mars 2022 (R.G.n°C.21.0006.F), adopté la conception restrictive précitée. Elle a en effet décidé que, s'il résulte des constatations de fait que l'administrateur exerçait son mandat sans organisation propre, il ne peut être qualifié d'entreprise au sens de l'article I.1.1° du Code de droit économique et ne peut donc être déclaré en faillite. Il en résulte qu'en l'état actuel du droit positif, seul l'administrateur ayant organisé l'exercice de sa mission en utilisant des moyens financiers, matériels et humains propres pourra être déclaré en faillite. Tout administrateur sera donc avisé de réenvisager l'organisation de son activité en qualité d'administrateur. Pourquoi, en effet, ne pas repenser les conditions d'exercice de sa mission alors que, in fine, il est probable que cette réorganisation soit parfaitement conforme à la réalité économique et financière de la fonciton et qu'elle offre, en outre, d'autres avantages, peut-être non négligeables, que ceux liés à la faculté, le cas échéant, et en dernier recours, de faire aveu de faillite ?


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